Peter Sellers. Un nom très connu – et admiré ! – des cinéphiles, qui est parvenu à charmer le public et la critique grâce à ses prestations absolument dingues dans The Party et la saga de la Panthère rose, deux films du génial Blake Edwards. Avec Mystère à Saint-Tropez, surprenante comédie estivale réalisée par Nicolas Benamou, Christian Clavier marche assurément dans les pas de Peter Sellers.
Note : 4.25/5
Déjà à l’époque, The Party était un film absolument kitsch, très coloré et qui poussait à fond l’humour de situations déjà absurdes. Pour autant, le film était une grande réussite car tout s’enchaînait de manière naturelle et le personnage principal, incarné par Peter Sellers, était aussi parfait que médiocre. Sans Peter Sellers, le film n’aurait sans doute jamais connu un tel engouement, même des années après. Tout comme Louis de Funès a donné ses lettres de noblesse à Oscar ou Jo. Christian Clavier, dans Mystère à Saint-Tropez, réussit peu ou prou un exploit similaire.
Pour tout vous avouer, la bande-annonce découverte il y a quelque temps déjà, laissait penser à une comédie manquant de souffle et d’idées. Une comédie dont les seuls moments drôles seraient regroupés au sein de la bande-annonce. Certains mauvais esprits ont même critiqué le cast avec une ferveur ferveur. Mais en réalité, le film est bien plus percutant que ça et se révèle être une véritable bouffée d’oxygène en ces temps difficiles.
Sabotage et lettres anonymes
Le pitch est simple et plutôt classique. Durant l’été 1970, c’est l’époque yéyé et un couple de milliardaires, les Tranchant, ont invité un certain nombre de célébrités dans leur somptueuse villa située à Saint-Tropez. Leur décapotable, une Floride, est sabotée et l’un des amis du couple manque d’être tué dans l’accident. Tranchant, voulant éviter un scandale, fait alors appel au secrétaire d’État Jacques Chirac. Ce dernier décide d’envoyer le meilleur limier de Paris sur place. Mais il s’avère que seul le plus maladroit et incompétent d’entre eux est disponible. Il s’agit du balourd inspecteur Boulin… L’enquête s’annonce longue et explosive !
Bande-annonce
La grosse force de ce film, c’est Christian Clavier. Habitué aux rôles de bougons depuis quelques années déjà, notamment dans l’excellent Une heure de tranquillité ou encore dans Momo. Même dans Kaameloot : premier volet, il a un rôle très mordant, bien que secondaire dans l’intrigue. Ses rôles récents sont souvent drôles dans leurs dialogues, contrairement à ses premières prestations telles que dans les Visiteurs ou Papy fait de la résistance, où il montrait un côté « maladroit », ajoutant de fait un comique gestuel faisant penser à Pierre Richard, Jacques Tati et donc Peter Sellers. Dans Mystère à Saint-Tropez, il incarne un inspecteur proche de la retraite, bedonnant et manquant clairement de charisme et d’entrain.
Son physique est proche de ceux d’Hercule Poirot et du commissaire Bourrel. Il enchaîne maladresse sur maladresse et cela lui attire des ennuis, mais aussi une forme de mépris de la part des « gens de la Haute » chez qui il vient enquêter sous couverture. Un peu comme un célèbre lieutenant de police américain ayant un vieux chien, une vieille voiture et une mystérieuse femme… à savoir Columbo. Le mépris reçu permet aux deux fins limiers de déceler des failles dans les comportements des suspects et finalement, d’élucider les enquêtes.
L’inspecteur Boulin mène l’enquête de manière atypique, mais singe les plus grands à certains moments, le succès en moins ! Lorsqu’il fait convoquer les suspects dans le petit salon, comment ne pas penser aux résolutions des enquêtes d’Hercule Poirot, le détective belge à moustache dont les petites cellules grises font des miracles sur chaque enquête ? Sauf que Boulin, lui, se retrouve dans de sales draps…
Trop de personnages tuent les personnages…
Le reste du cast est assez inégal : Gérard Depardieu joue son rôle de directeur de police de manière très nerveuse, comme à son habitude, et cela peut parfois nuire au film. Benoît Poelvoorde est excellent dans son rôle du baron Tranchant : coloré et élégant, il est aussi méprisant envers le policier venu de Paris. Il écorche systématiquement le nom de Boulin, et ce dernier s’en énerve facilement, y compris lorsque le baron lui fait involontairement un compliment via une référence au génial commissaire Bourrel (incarné par Raymond Souplex dans les Cinq Dernières minutes). Notons que les plus jeunes ne comprendront sans foute pas cette petite référence culturelle, à notre grand regret… Le baron n’aime personne sauf ses chiens et, avec lui, tout le monde en prend pour son grade, y compris sa femme mais aussi le pauvre cuisinier de la villa.
Le cuisinier, justement, est incarné à merveille par un Jérôme Commandeur très drôle et ayant visiblement oublié de muer. La maîtresse de maison, incarnée quant à elle par Virginie Hocq, manque un peu de scènes pour qu’on puisse juger de l’étendue de son talent comique. Nicolas Briançon, jusque-là cantonné à à tort dans de très petits rôles – sauf dans la série Engrenages ! -, brille enfin et montre une surprenante palette d’émotions.
Et puis le film a également l’intelligence d’avoir, en guest, l’un des compères de Christian Clavier, en la personne de Thierry Lhermitte en pseudo-dragueur branchouille et chevelu. Un rôle surprenant qui va plutôt bien à l’ancien acolyte de Jacques Villeret dans le Dîner de cons.
Rossy de Palma est sans doute la comédienne qui a le personnage le plus « maltraité » : le jeu habituellement si enthousiaste et volubile de Rossy de Palma est ici inexistant. Problème de direction de comédiens ou volonté du réalisateur ?
C’est assez bizarre, quoi qu’il en soit, et cela plombe un peu les rares fois où son personnage est mis à contribution…
Le film enchaîne les situations absurdes au fur et à mesure que l’intrigue policière se déroule et l’on suit sans déplaisir l’inspecteur Boulin face aux nombreux suspects potentiels. Si la mise en scène ne brille pas particulièrement, elle se révèle suffisamment dynamique pour ne pas provoquer l’ennui et parvenir à saisir de jolis moments. Par ailleurs, le dénouement réserve quelques surprises.
En somme, un film idéal pour s’aérer le cerveau et se divertir l’été après une grosse année particulièrement compliquée. C’est quasiment tou ce qu’on demande à ce film, et la mission est remplie ! Christian Clavier renfilera-t-il la tenue du maladroit inspecteur Boulin dans un nouvel opus dans les années à venir ? Mystère…
N.V